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Été 2016 – Numéro 55
Conseil universitaire du 7 juin 2016
LA RECONNAISSANCE DU CENTRE DE RECHERCHE EN DONNÉES MASSIVES (CRDM) SUSCITE L’EXPRESSION ANIMÉE DE POINTS DE VUE DE LA PART DE MEMBRES
Le professeur Pascal Daleau, président, souligne d’abord la présence de Mme Marise Ouellet, secrétaire permanente de la Commission de la recherche, avant de décrire les caractéristiques du Centre de recherche en données massives (CRDM) en vue de sa reconnaissance institutionnelle par les membres du CU. « La création du CRDM est le fruit d’une réflexion sur le développement de nouveaux regroupements de chercheurs à l’Université », constate-t-il d’entrée de jeu. Le domaine des données massives a été identifié en 2014 comme un champ de développement prioritaire et hautement porteur par la Faculté des sciences et de génie après quoi la direction a confié au professeur François Laviolette du Département d’informatique et de génie logiciel d’en définir les bases. Puis Pascal Daleau explique que l’analyse des données massives est définie comme un ensemble de techniques et d’outils utilisés dans le processus d’interprétation de données générées par une numérisation de tout type d’information et par le monitoring des activités humaines et de l’environnement. Le CRDM regroupe actuellement 30 membres réguliers provenant des Facultés de sciences et de génie (24), de médecine (4), de foresterie, de géographie et de géomatique (1) et des sciences de l’administration (1) pour un total de onze départements, « ce qui dépasse largement le nombre minimum de membres réguliers requis par la politique de reconnaissance et d’évaluation des centres de recherche dans notre institution, soit huit », admet-il.
Trois thématiques orientent les activités de recherche du CRDM : le traitement des données partiellement ou non structurées ainsi que la représentation des connaissances, le traitement et l’analyse des données en provenance des sciences de la vie et, enfin, la sécurité et la confidentialité des données. Pascal Daleau constate que le CRDM est déjà largement connu dans le milieu régional de l’entreprise privée, en particulier grâce aux constants efforts déployés par sa direction. « La plupart des secteurs nécessitant l’exploitation de données massives, ajoute-t-il, ne sont plus en mesure de faire face au déferlement actuel de données. » Il est convaincu que cette création, issue du regroupement des forces vives en recherche sur les données massives, n’a pas présentement son équivalent au Québec et au Canada. Enfin, le président de la Commission de la recherche atteste que cette dernière « encourage le CRDM à développer les aspects de l’éthique et du droit concernant le respect de la vie privée en collaboration avec la Faculté de droit et l’Institut d’éthique appliquée (IDÉA). » Il prévoit que ce centre va positionner clairement l’Université Laval dans un secteur clé de l’économie numérique du futur.
Invités par le recteur Denis Brière, président du Conseil universitaire, à poser leurs questions et à exprimer leurs points de vue, plusieurs membres ont participé à un débat animé sur le sujet. Dans une perspective éthique, le professeur Pierre-Éric Landry (Médecine dentaire) a suggéré que l’éthique sur « l’exploitation et la manipulation des données » fasse partie de la mission du centre si celle-ci n’était pas prévue dans son plan de recherche. « Et il devrait y avoir un volet nommément libellé à cette enseigne », estime-t-il. Le président Daleau reconnaît que cette approche n’a pas été explicitement mentionnée comme telle dans le rapport de la Commission bien qu’elle y soit évoquée en relation avec le droit. La professeure Nadia Tawbi intervient alors pour faire remarquer que les chercheur.e.s qui s’occupent de la question de la sécurité et de la confidentialité des données limitent leurs préoccupations aux aspects techniques. « Mais qui décide qui a un droit d’avoir un accès à l’information, ce n’est pas du ressort du chercheur actuellement », constate-t-elle. Elle croit qu’un besoin d’une responsabilité politique se fait sentir en ce domaine afin de décider « qui a un droit d’accès à telles ou telles données et qui n’a pas le droit à de telles données ».
Le professeur Marc-André Sirard (Agriculture et alimentation) pense que des représentations devraient être faites auprès des organismes subventionnaires en sciences de la santé, en sciences de la nature et en sciences humaines afin qu’ils accordent un soutien financier concomitant à des centres de recherche du type du CRDM. Et d’insister sur le fait que « plusieurs centres inter-facultaires ont été pénalisés depuis 20 ans par le cloisonnement des sources de soutien, particulièrement dans les programmes destinés aux équipes-réseaux-infrastructures. » Il souhaite donc que l’Université Laval prenne le CRDM en exemple pour inciter les deux paliers de gouvernement à développer un programme de soutien financier adapté à sa nouvelle structure de fonctionnement. La professeure Florence Piron (Lettres et sciences humaines) est d’avis qu’une chance a été ratée d’avoir un vrai centre multidisciplinaire « qui intègre des chercheurs des sciences sociales et humaines ». À ce propos, elle rappelle qu’un domaine très dynamique existe dans ces sciences, les humanités numériques, où les chercheur.e.s étudient aussi les données massives. Elle annonce qu’elle votera contre la reconnaissance du CRDM «si vous n’ajoutez pas une recommandation à l’effet d’intégrer les chercheur.e.s qui travaillent sur les données massives en sciences sociales et humaines. »
Le professeur Pascal Daleau entreprend de lui répliquer au moment où il voit la professeure Nadia Tawbi manifester son désir de prendre la parole. Il la lui cède. Cette dernière réfère à nouveau à la thématique de la sécurité et de la confidentialité des données en admettant que la critique de la professeure Piron est pertinente. Mais elle considère qu’il serait dommage de ne pas reconnaître le CRDM d’autant qu’il est prévu dans son plan de développement de demander conseil à des experts des diverses disciplines universitaires. « C’est nouveau les sciences de données, et c’est appelé à évoluer. Ce serait dommage de tuer l’œuf avant qu’il n’éclose », affirme-t-elle. Le doyen de la Faculté des sciences et de génie, le professeur André Darveau, poursuit en soutenant qu’il ne s’agit pas d’une chance ratée mais bien d’une opportunité. « Dès le départ, la vision était de créer un centre multidisciplinaire qui allait incorporer des chercheur.e.s de la plupart des facultés », raconte-t-il. Il précise en outre que sa faculté considère les questions éthiques «au cœur de tout ce qui touche le génie » comme étant très importantes ; ce qui amène celle-ci à travailler avec la Faculté de philosophie. Le vice-recteur exécutif et au développement, le professeur Éric Bauce, reconnaît que le dossier du CRDM est « fascinant » parce qu’il se rattache aux grands défis de la transdisciplinarité dont celui de la double appartenance des chercheur.e.s aux départements de leur faculté respective. À son avis, c’est un centre qui va avoir de l’influence « parce qu’il y a beaucoup de questions qui se posent à l’interne qui ont des impacts sur le fonctionnement de notre institution ». Il adhère enfin à la critique faite précédemment par le professeur Marc-André Sirard concernant l’absence de décloisonnement du financement des centres de recherche dont les organismes subventionnaires sont les tenants.
Douze programmes de baccalauréat en génie
Les membres du CU ont examiné les rapports d’évaluation des douze programmes de baccalauréat en génie chimique, civil, des eaux, électrique, géologique, industriel, informatique, logiciel, mécanique, physique ainsi que le rapport du baccalauréat coopératif en génie des matériaux et de la métallurgie et celui en génie des mines et de la minéralogie. Le vice-recteur aux études et aux activités internationales, le professeur Bernard Garnier, a présenté une synthèse de ces rapports rédigés par le Comité institutionnel d’évaluation des programmes (CIEP) dont le résultat sur 12 points de leurs principales forces selon les mentions habituelles comme la compétence des membres du personnel, leur disponibilité et autres mentions. Toutes obtiennent 12/12 sauf les activités de laboratoire (présence de nombreux centres de recherche et de laboratoires), 8/12 ; les mesures de soutien en mathématiques, statistiques et le tutorat, 11/12. Le vice-recteur a identifié la distinction faite dans ces rapports entre une « recommandation » et une « suggestion ». Il a expliqué que la distinction a été introduite récemment par le CIEP « afin d’indiquer une priorité de réponse » aux avis qu’il émet.
Intervenant en premier lieu, le professeur Marc-André Sirard se préoccupe de la déontologie qui devrait être enseignée dans ces programmes. Il se demande comment des professeur.e.s qui donneront des cours en déontologie pourront devenir agrégés compte tenu de la diversité des critères actuels de promotion dans les départements auxquels ils appartiendraient. Le doyen André Darveau reconnaît le problème d’intégration pour ces professeur.e.s que soulève la préoccupation éthique du professeur Sirard. Il l’informe qu’un travail de réflexion se poursuit présentement avec la Faculté de philosophie et que, par ailleurs, il est envisagé de créer une unité interdisciplinaire à sa faculté à laquelle pourraient appartenir des professeur.e.s en déontologie dans les programmes de génie. La professeur Nadia Tawbi insiste sur la difficulté que posent les contraintes du Bureau canadien d’agrément des programmes de génie (BCAPQ) imposées au programme du baccalauréat en génie logiciel. « Quand le BCAPQ a imposé ses contraintes au génie logiciel, il a copié les contraintes dictées à d’autres disciplines du génie », déplore-t-elle. Et d’ajouter que le génie logiciel comme toute autre discipline émergente a ses propres caractéristiques dont les contraintes retenues ne tiennent pas compte pour l’instant. Le professeur André Potvin (Aménagement, architecture, art et design) se réjouit de l’ouverture de la Faculté des sciences et de génie à l’égard de l’interdisciplinarité. Cependant il constate que ce mode de fonctionnement de la recherche ne retient pas actuellement l’attention du BCAPQ. « Une manière de le sensibiliser à l’interdisciplinarité serait peut-être de l’inviter à travailler avec l’Institut en environnement, développement et société (EDS) de l’Université », suggère-t-il.
Divers autres dossiers
La professeure Mireille Lavoie, doyenne de la Faculté des sciences infirmières, a demandé la modification des conditions d’admission dans le programme de baccalauréat en sciences infirmières (formation DEC-BAC) pour les étudiant.e.s ayant complétés une formation en soins infirmiers hors Québec. Cette modification exige que ces étudiant.e.s soient détenteurs d’un permis de pratique délivré par l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) au moment du dépôt de leur demande d’admission. Le professeur Pierre-Éric Landry demande si cette modification n’est pas une entrave à la personne qui n’aurait pas l’intention de pratiquer au Québec. La doyenne Lavoie précise que les personnes hors Québec qui demande leur admission à sa faculté le font avec l’intention de pratiquer au Québec. Le professeur Ronald Beaubrun veut savoir si d’autres universités québécoises ont la même exigence d’un permis de pratique délivré par l’OIIQ. Mireille Lavoie confirme alors que l’Université Laval était la seule université québécoise à ne pas avoir cette exigence jusqu’à maintenant.
La Commission des études a recommandé la création d’un programme de maîtrise (avec ou sans mémoire) en biostatistique et d’un programme de doctorat en biostatistique. Ces programmes ont été approuvés et seront mis en vigueur dès qu’ils auront obtenu le feu vert du Bureau de coopération interuniversitaire et du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur en étant rattachés conjointement à la Faculté des sciences et de génie et à la Faculté de médecine.
Le Centre de recherche sur les matériaux renouvelables (CRMR) a obtenu le renouvellement de son statut de centre reconnu. Il doit présenter un rapport d’étape dans trois ans « sur l’évolution du nombre d’étudiant.e.s diplômée.e.s à la maîtrise et au doctorat ainsi que sur le nombre d’étudiant.e.s inscrit.e.s à la maîtrise » avant sa prochaine évaluation dans cinq ans. Le CIRRELT a aussi obtenu le renouvellement de son statut de centre reconnu. Il sera évalué à nouveau dans cinq ans.
Trois suggestions ont été faites dans l’évaluation des programmes de maîtrise et de doctorat en génie chimique. La première demande de mieux informer les étudiant.e.s des emplois auxquels mènent ces programmes. La deuxième propose de clarifier les directives liées à l’exposé oral probatoire au sein de deux cours de communication orale. La troisième souhaite que le nombre d’activités pratiques au sein de ces programmes soient augmentées. À ce sujet, le doyen André Darveau ne voit pas la pertinence de cette suggestion étant donné qu’elle touche des programmes d’études supérieures axés sur la recherche.
EN BREF
- Un programme de formation médicale spécialisée en endocrinologie et métabolisme chez l’adulte sera implanté le 1 juillet 2016 à la Faculté de médecine ;
- Les admissions ont été suspendues dans le programme de diplôme d’études supérieures spécialisées en sciences de la vie en raison « du faible nombre de demandes d’admission et d’inscriptions depuis plusieurs années, du faible nombre de diplômé.e.s ainsi que des difficultés rencontrées par les étudiant.e.s pour trouver une ou un professeur afin de les superviser dans leur formation pratique ».
- Aucune modification n’a été apportée au contingentement des programmes de premier cycle pour l’année 2017-2018.
Jacques Rivet, cc
CORRECTION : Le résultat du vote concernant le Règlement disciplinaire approuvé à la séance du CU du 3 mai 2016 est de 30 pour, 7 contre et 6 abstentions et non de 40 pour et 2 abstentions comme il a été publié par erreur.
Soutenance de thèse de doctorat en biologie cellulaire et moléculaire de Kévin Sollier
Le professeur Steve Jean
« Une mise en évidence de l’importance de la régulation de l’identité épithéliale et de son impact sur la morphogenèse d’un tissu »
Sous la direction du professeur Patrick Laprise du Département de biologie moléculaire, biochimie médicale et pathologie (DBMBMP), M. Kévin Sollier a soutenu une thèse de doctorat en biologie cellulaire et moléculaire sur « Les fonctions et régulations des protéines Crumbs dans la morphogénèse des tissus épithéliaux » Les tissus épithéliaux sont constitués de cellules étroitement juxtaposées qui forment une barrière entre les différents compartiments de l’organisme. Prenant la parole en dernier selon le rituel habituel du fonctionnement d’un jury de doctorat, le professeur Laprise a souligné la grande qualité des explications du doctorant contenues dans son mémoire de thèse, particulièrement à propos des schémas qui les accompagnent. « Les schémas de la thèse, constate-t-il, traduisent parfaitement bien les notions qu’elle contient ; ce qui n’est pas toujours le cas dans ce type de travail. » Il reconnaît également que le doctorant a conçu des modèles fort pertinents dans sa démarche de recherche. Enfin, il a rappelé que lui et le candidat ont publié un important article dans une revue internationale concernant des recherches effectuées en tandem. Leurs données, basées sur leurs publications antérieures, définissent les bases moléculaires de la morphologie des tissus épithéliaux et permettent d’expliquer les dysfonctions épithéliales associées à certaines pathologies.
Le professeur Steve Jean du Département d’anatomie et biologie cellulaire de l’Université de Sherbrooke est intervenu en premier à titre d’examinateur externe au début des commentaires des membres du jury qui faisaient suite à la présentation de la recherche par Kévin Sollier. « Les travaux de M. Kévin Sollier, a-t-il évalué, ont mis en évidence l’importance de la régulation de l’identité épithéliale et de son impact sur la morphogenèse d’un tissu. » Le professeur Jean-Yves Masson a tenu un dialogue avec le candidat sur sa démarche scientifique à partir de quelques illustrations graphiques présentées dans son mémoire. Il a reconnu « avoir beaucoup appris de sa recherche ». La professeure Lucie Jeannotte (DBMBMP) a fait de même à propos de plusieurs aspects méthodologiques de la thèse. Elle estime qu’à long terme, les résultats obtenus par Kévin Sollier « participeront à l’élaboration d’outils de diagnostic et de pronostic utiles ainsi qu’à d’éventuelles thérapies pour des pathologies associées à la dérégulation de la polarité cellulaire (une distribution asymétrique des constituants cellulaires), tel le cancer ».
La soutenance de thèse présidée par la professeure Josée Lavoie (DBMBMP) s’est déroulée durant plus de deux heures à l’auditorium de l’Hôtel-Dieu de Québec devant un auditoire d’une cinquantaine de personnes. Kévin Sollier a reçu le titre de docteur en biologie moléculaire et cellulaire ainsi que les chaleureuses félicitations des membres du jury. -JR