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12 septembre 2024

L’Université Laval dépose ses cinq principes directeurs pour l’utilisation de l’IA

L’Université Laval a récemment publié ses cinq principes directeurs concernant l’utilisation de l’intelligence artificielle générative dans l’enseignement et l’apprentissage. Cette réflexion repose sur un certain nombre de sources en enseignement supérieur et sur la consultation en ligne menée auprès des professeur(e)s et des étudiant(e)s à l’hiver dernier, et s’inscrit en particulier dans la lignée des recommandations du rapport du Conseil de l’innovation du Québec (2024), conseil qui est présidé par notre rectrice, Sophie D’Amours.

Bien que le SPUL salue l’initiative de l’Université de se doter d’un cadre de réflexion sur un sujet qui va grandement affecter tous les aspects du travail des professeur(e)s, le CEX se désole néanmoins de n’avoir pas été consulté avant la publication des principes. Pourtant, le 22 mars 2024, le vice-recteur adjoint aux services à l’enseignement et à la formation tout au long de la vie, Sehl Mellouli, avait été convié à une rencontre afin d’ouvrir la voie à une collaboration avec le SPUL sur ce dossier. 

De manière générale, le SPUL reconnait l’effort de l’UL de donner la primauté à la relation humaine face aux technologies de l’IA (même si, paradoxalement, la page couverture de son document montre une salle de classe complètement vide…). Il questionne néanmoins la nature de certains principes qui se libellent plutôt sous la forme de directives. Par exemple, pour le premier principe, Primauté de la relation humaine, au point 1.3, on mentionne : « Si, pour des motifs raisonnables, une personne étudiante s’objecte à l’utilisation d’un outil spécifique d’IA pour la réalisation d’activités d’apprentissage ou d’évaluation, elle est invitée à en discuter avec la personne responsable de l’activité de formation, afin qu’une autre option soit envisagée en cohérence avec les objectifs de cette activité de formation ». Selon le SPUL, ce sous-principe, en plus de normaliser l’usage de l’IA, impose un devoir d’accommoder une personne étudiante qui ne voudrait pas utiliser un outil de l’IA dans le cadre d’une activité pédagogique spécifique. En plus d’ouvrir la porte à une personnalisation de l’enseignement, cette directive aura des impacts sur la charge de travail professorale. 

De même, le principe 2, Ouverture, exploration et formation, impliquerait l’exigence d’introduire de l’IA dans les parcours de formation (sous-principe 2.2). De plus, ce principe met en avant-plan le but visé, soit l’innovation technologique, plus que la réflexion critique envers l’intégration de l’IA lors de l’enseignement et l’apprentissage. Si des activités et des outils de formation sont offerts, l’impact de la participation à ces activités et de la maitrise des outils sur la charge de travail des professeur(e)s n’est pas abordé. Le rapport Intelligence artificielle générative en enseignement supérieur : enjeux pédagogiques et éthiques du Conseil supérieur de l’éducation et de la Commission de l’éthique en science et en technologie souligne pourtant bien pour les institutions d’enseignement la nécessité de rééquilibrer les tâches des professeur(e)s en conséquence (recommandation no 14). 

Le principe 3, Prudence et utilisation éclairée, apporte certaines nuances sur l’usage de l’IA et ses effets délétères, mais, du même coup, attribue la responsabilité de son usage aux personnes utilisatrices, dont les professeur(e)s, à une période où encore beaucoup d’entre eux et elles ne seront pas en mesure d’en maitriser tous les aspects. Ce principe ne traite pas des impacts de l’IA sur les processus d’apprentissage et d’évaluation, impacts qui pourraient, encore là, alourdir la charge de travail des professeur(e)s. Le SPUL se voit néanmoins heureux de l’introduction du concept de sobriété numérique et en appelle à concrétiser davantage les moyens pour le mettre en œuvre. 

Le principe 4 (Intégrité et transparence), en écho au deuxième principe, favorise l’intégrité et la transparence dans l’utilisation de l’IA. Bien qu’essentiel dans un contexte universitaire, ce principe impose une exemplarité aux professeur(e)s qui impliquerait une maitrise approfondie des outils et des modalités de l’IA. 

Enfin, le dernier principe, Intelligence collective et collaboration, accorde un rôle de premier plan à des « personnes professionnelles ayant une expertise concernant l’IA pour l’enseignement et l’apprentissage ». Le SPUL s’interroge sur l’ingérence potentielle que ces personnes pourraient exercer dans les orientations pédagogiques d’un cours, étant donné que leur rôle et leurs fonctions ne sont pas définis. Cela risque de nuire, à terme, à l’autonomie du professeur(e). 

Cette brève analyse montre que le rapport contient plusieurs principes qui affecteront directement le travail des professeur(e)s, notamment en plaçant essentiellement toute la responsabilité de leur mise en œuvre sur leurs épaules. Le document omet également de traiter des conséquences majeures sur la charge de travail professorale et des impacts sur l’apprentissage selon les types d’évaluation utilisés. 

Le comité exécutif du SPUL devra se pencher de manière plus approfondie sur ces principes afin que les intérêts des professeur(e)s soient adéquatement représentés et protégés dans les prochains mois. Il suivra également de près un projet d’expérimentation sur la correction à l’aide de l’IA qui a été amorcé par certaines facultés.

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